Suite de la traduction latin/français du grimoire de Paracelse
Le Ciel des Philosophes
ou Livre des Recherches
La science et l'essence alchimiques
Ce qu'il faut penser de l'alchimie
Livre contenant les sept règles ou canons pour les sept métaux connus
Canon premier traitant de la nature et de la propriété du mercureTout est caché en tout. Une chose demeure plus cachée que les autres, c'est le vase matériel, visible et mobile qui les contient.
On trouve dans ce vase tous les liquides. Ce vase, esprit vivant et matériel, existe ; il renferme toutes les coagulations, toutes les congélations. On ne peut lui donner de nom. Il a plus de force que que toutes les autres chaleurs, on ne peut que le comparer au feu de la Géhenne.
Ce vase, qui est une sorte de liquide n'a rien de commun avec les choses fondues par le feu naturel. Et ces congélations ne sauraient demeurer intactes dans ce Mercure.
Il est donc permis de penser que les forces corruptrices des Eléments n'ajoutent ou ne retranchent rien aux forces célestes (qui sont appelées Quintessence (voir note ci-dessous) et ne commandent point à ces forces célestes ou aux forces infernales
NOTE
Cette Quintessence c'est le Mercure philosophique, à la vérité, ce n'est point chose matérielle, c'est la vie, ou, plutôt, le milieu nécessaire à l'éclosion et au développement de la vie. Les éléments sont choses matérielles, pondérables. Canon second traitant de la nature et de la propriété de l'étainIl est évident que l'étain tient des six autres métaux, néanmoins, il en diffère au point de constituer un métal spécial. Il ne tient pas de la Quintessence mais de la nature des quatre éléments.
Aussi pour le faire entrer en fusion, une légère chaleur suffit-elle, et, pour le coaguler, un léger froid. Il s'allie facilement aux métaux en fusion. Car, plus une chose ressemble à une autre, plus elle s'unit facilement à elle.
L'étain se rapprochant plus de l'or et de l'argent que du fer et du cuivre contient surtout (façon de parler) ces deux premiers métaux, et il est plus grand, plus fort, plus brillant, plus aimable, plus recherché, plus respecté, plus vrai que les deux autres.
Plus une chose est éloignée moins on la recherche, car toujours l'on préfère ce que l'on voit. Plus une chose est proche, plus elle apparaît évidente ; plus elle est éloignée plus elle apparaît problématique.
Toi, alchimiste, place de l'étain dans les lieux éloignés et dissimulés où gisent l'or et l'argent, place de l'or et de l'argent dans les lieux proches où git l'étain : l'or et l'argent apparaîtront partout à tes yeux.
Il y a, en effet, plusieurs moyens de transmuter les métaux imparfaits en métaux parfaits.
D'abord, mêler l'un à l'autre, puis, séparer le pur et l'impur : telle la transmutation pour parfaire l'oeuvre alchimique.
L'étain contient plus d'or que d'argent.
Canon troisième traitant du fer et de ses propriétésLe fer doit aux six autres métaux sa grande dureté, son poids et la force de sa coagulation. Par contre, il leur a laissé la couleur, la facile liquéfaction et la noblesse. Il est difficile de faire d'un homme bête et vulgaire un Prince ou un Roi. Mais, Mars (le fer), grâce à sa force, acquiert la souveraineté et s'empare de la place du Roi s'il prend garde aux embûches et ne se laissent pas emprisonner.
Canon quatrième traitant du cuivre et de ses propriétésLes six autres métaux ont donné au cuivre toute leur couleur et une assez facile liquéfaction. Il est nécessaire de produire quelques exemples pour que l'on comprenne comment le feu fait apparaître ce qui est caché et cache ce qui apparaît.
Tout ce qui est combustible peut être naturellement transmuté par le feu, changer de forme grâce à lui, témoins la chaux, les cendres, le verre, les pierres, ou devenir une terre dont on pourra tirer une foule de corps métalliques.
Un métal alors même qu'il est brûlé ou dévoré par la rouille, peut redevenir malléable grâce au feu.
Canon cinquième traitant de la nature et de la propriété du plombVoici ce que dit le plomb au sujet de sa nature : "Les six autres métaux m'ont refusé leur spiritualité, ils m'ont donné un corps corruptible comme il n'en ont pas et ne désirent pas en avoir. Mes six frères sont de nature spirituelle ; aussi, lorsque je suis enflammé, pénètrent-ils mon corps et périssent-ils avec moi à l'exception de l'or et de l'argent que mon eau lave et fait resplendir.
Mon esprit est l'eau qui amollit les corps froids et gelés de mes frères. Cependant mon corps penche vers la terre : de tout ce que je reçois je fais un seul corps. Je pourrais être très utile si l'on savait ce que je renferme. La pierre du froid est en moi, c'est l'eau, laquelle me permet de congeler les esprits des six autres métaux dans le corps d'un septième, c'est-à-dire d'approcher de l'or et de l'argent.
Il y a deux sortes d'antimoine : d'abord l'antimoine vulgaire, noir, qui purifie l'or liquide et a beaucoup d'affinité avec le plomb. Ensuite, l'antimoine blanc, appeler magnésie ou bismuth, qui a beaucoup d'affinité avec l'étain, et qui, mêlé à la première sorte d'antimoine, accroît l'argent.
Canon sixième traitant de l'argent et de ses propriétésDe l'argent tirer du plomb ou du fer n'est pas plus facile que tirer l'argent du mercure, de l'étain, du fer, du cuivre ou du plomb. Mais, il importe seulement de transmuter l'imparfait en parfait. Quelle que soit la nature de l'argent, il faut la connaître. Sinon, on ne pourra faire de l'argent.
L'argent est un corps matériel contenant les six autres métaux à l'état spirituel. Car, toujours, un métal contient les six autres métaux à l'état spirituel. Six métaux à l'état spirituel ne persistent que dans le septième.
Et pas un métal ne peut exister matériellement s'il ne contient pas les six autres à l'état spirituel. Les sept métaux sont bien mélangés par la liquéfaction, mais de ce mélange l'on ne peut tirer de l'or ou de l'argent.
Car, dans ce mélange, chaque métal garde sa nature, qu'il soit fixe au feu ou qu'il ne le soit pas. Voilà un exemple : mélange, comme tu voudras, les sept métaux : tu n'arriveras pas à transmuter les cinq métaux vils en or ou en argent ; car, bien que tous les liquides se mélangent en une seule masse, chacun garde sa nature.
Voilà pour le mélange matériel. Quant au mélange spirituel, sache que les esprits ne peuvent se séparer parce qu'ils ne peuvent subsister en dehors des corps. Alors même qu'en un heure le corps leur serait arraché cent fois, les esprit n'obtiendraient rien de plus noble que ce qu'ils sont.
Et l'on peut transmuter un métal qu'en un métal à lui supérieur (voir note), on ne peut, par exemple, transmuter l'argent qu'en or qui est assurément le roi des métaux.
NOTELes alchimistes prétendaient que les métaux parcourent un cycle : le premier métal est le fer, le dernier l'or qui en se putréfiant redonne du fer. Ceci est vrai ; un métal ne saurait être engendré que par les six autres métaux.
Question : Si vraiment l'argent ou tout autre métal doit son origine aux six autres métaux, quelle est sa nature, quelles sont ses propriétés ?
Réponse : de l'étain, du plomb, du mercure, du fer, du cuivre, de l'or l'on ne peut tirer que de l'argent.
Six métaux ont chacun deux propriétés remarquables, ce qui, en tout, fait douze propriétés. Ces douze propriétés forment l'esprit de l'argent. L'argent, en effet, participe des esprits des six autres métaux et des deux propriétés de chacun de ces métaux.
L'on peut comparer ces douze propriétés aux douze signes du zodiaque. L'argent, en effet, tient, d'une part, de la planète Mercure, et, de l'autre, du Verseau et des Poissons sa faculté de liquéfier et son éclat ; il tient de Jupiter, du Sagittaire et du Taureau sa couleur blanche et la force résistance qu'il oppose au feu. Il tient de Mars, du Cancer et du Bélier sa dureté et sa sonorité. Il tient de Vénus, des Gémeaux et de la Balance sa faculté de coaguler et sa malléabilité. Il tient de Saturne, de la Vierge et du Capricorne son homogénéité et sa densité. Il tient du Soleil, du Lion et de la Vierge sa pureté.
Note du traducteur : Il me semble utile de signaler que Paracelse est l'un des rares alchimistes à se référer à l'astrologie qu'il pratiquait d'ailleurs à un niveau très avancé. Il faut dire maintenant que ces esprits métalliques acquièrent, au moment où ils naissent sous l'influence céleste, un corps ayant l'aspect d'une pierre ordinaire, pierre que les artisans rendront plus noble, meilleure, dure et pourtant malléable en la broyant, l'amenant à l'état de fusion, la corrompant et la mortifiant par le feu.
L'alchimie ne fait autre chose que corrompre, mortifier et préparer artificiellement un tel corps métallique. Toutefois, cela n'a pas lieu pour l'or et l'argent lesquels ne peuvent être corrompus par le feu et dont corps et esprit ne font qu'un.
Canon septième traitant de la nature et des propriétés de l'or. Les esprits des six métaux que nous venons d'étudier forment l'or qui n'est autre chose que du feu pur. L'or est plus beau, plus jaune, plus brillant, plus dense, plus froid que ces six métaux parce qu'il les renferme tous les six à l'état de congélation.
Il entre en fusion sous l'action du feu ou sous l'influence de la planète Mercure, du Verseau et des Poissons. C'est ainsi que l'or se mêle facilement au mercure ; mais, après leur fusion commune, la chaleur quittant l'or, et le froid arrivant, les cinq autres métaux, étain, plomb, fer, cuivre, argent dont cet or contient les principes en profitent pour le re-coaguler, le faire redevenir dur et solide ; ces cinq métaux, étant de leur nature surtout froids, et le mercure n'étant point de sa nature assez chaud pour lutter contre la froideur des cinq autres métaux, l'or ne peut rester en état de fusion que sous l'action du feu naturel. Aussi, l'or tient-il plutôt de ces cinq métaux que du seul mercure.
Le mercure n'a rien de particulier que de demeurer toujours liquide. Aussi, ne peut-il rien contre la congélation des autres métaux et dans les cas où il s'agit de corps durs ; il n'est utile que dans ceux où il s'agit de liquides.
Il dégage un fluide chaud tout en paraissant mort, froid, et ayant la nature des corps durs. Si l'on veut faire entrer en fusion les six métaux froids, plomb, cuivre, étain, fer, argent et or, il faut leur fournir la chaleur du feu. Dès que le métal en fusion aura été éloigné du feu, il se recongèlera de lui-même grâce à sa nature froide, il redeviendra dur et immobile.
Mais, le mercure, qui demeure toujours fluide et vivant, le doit-il à la chaleur ou à la froideur ? Celui qui prétend que le mercure doit sa vie au froid et à l'humidité ne connaît pas sa nature et se trompe grossièrement.
Le mercure tire sa vie non du froid mais de sa nature chaude et ignée. Bien que vivant il est le feu ; et le froid le tue.
Le feu de l'or est pur, non vivant, mais bien dur, d'une couleur jaune-rouge. Les cinq métaux froids, étain, plomb, fer, cuivre et argent doivent à l'or leurs qualités, à sa froideur leur corps, à son feu leur couleur, à sa sécheresse leur dureté, à son humidité leur poids, à son éclat leur sonorité.
Notre feu ne peut brûler ni même corrompre l'or. Car, un feu ne peut brûler un autre feu, il ne peut que l'exciter. Le feu qui du soleil descend sur la terre n'est point tel qu'il nous apparaît dans le ciel, il n'est point semblable non plus au feu terrestre, il est froid et congelé, c'est de l'or. Notre feu ne peut donc consumer l'or, il ne peut que le faire entrer en fusion.
A suivre.....
© Jean-Claude THIMOLÉON JOLY
reproduction intégrale interdite, tout extrait doit citer mon site www.theraneo.com/thimoleon
Mots clés : paracelse,grimoire,alchimie,philosophie
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