Le Docteur Jean-Michel Morel est l’un des principaux organisateurs du Diplôme Universitaire de phytothérapie et d’aromathérapie à la faculté de médecine de Besançon. Installé comme médecin phytothérapeute dans cette même ville, il fait partager cette passion qui l’anime à ses élèves. Fort de ses expériences, il va aujourd’hui plus loin en écrivant un traité pratique et très approfondi de la phytothérapie. Ce livre s’appuie sur un constat grave et navrant : malgré un engouement croissant – aussi urgent que nécessaire – pour les produits naturels, la phytothérapie demeure encore en marge de la santé publique … En effet, alors que se manifeste un soutien grandissant à l’agriculture biologique et aux plantes médicinales, les industries agroalimentaires et pharmaceutiques mettent encore sur le marché des produits transformés et des médicaments mono moléculaires, souvent de synthèse, et dûment protégés par des brevets. Ce choix de la médecine moderne en faveur du médicament conventionnel au détriment du médicament à base de plantes n’est pas étranger à l’envolée des dépenses de la Sécurité Sociale.
L’ouvrage du Docteur Jean-Michel Morel éclaire admirablement ce paradoxe de notre époque et démontre combien la phytothérapie est à la fois l’origine et l’avenir de la pharmacopée. Il apporte une moisson d’arguments en faveur d’un retour et d’un recours à la phytothérapie, particulièrement bienvenue et indiquée pour les traitements des maladies fonctionnelles qui sont les plus nombreuses à amener le patient à consulter. L’auteur insiste aussi sur l’absence d’iatrogénèse de ces pratiques thérapeutiques, mises en œuvre depuis des siècles. Encore faudrait-il que la phytothérapie et les autres thérapies alternatives soient enseignées dans les facultés de Médecine ce qui n’est pas toujours le cas, du moins dans les cursus officiels….
Son livre inscrit la phytothérapie dans la modernité et la nettoie des préjugés et de son carcan désuet de « remèdes de bonne-femme ». En se basant sur ses fondements, Jean-Michel Morel expose ensuite les possibilités pratiques en matière de rhumatologie, maladies infectieuses, gastro-entérologie, cardiologie et troubles circulatoires, système nerveux, endocrinologie, nutrition et prévention alimentaire. Il souligne les nombreux champs d’action où les plantes peuvent toujours prouver leur efficacité en remplacement ou en complément d’autres traitements.
L’industrialisation pharmaceutique ne peut faire oublier que la thérapeutique par les plantes est la mère de la médecine. Elle est le socle solide sur lequel presque toute notre pharmacologie actuelle s’est construite. Au sein de la révolution écologique qui s’annonce aujourd’hui et dans cette grande vague de fond que représente la prise de conscience de l’urgence d’un développement durable, la réhabilitation des plantes médicinales trouve légitiment sa place. Cet ouvrage y apportera sans aucun doute une forte contribution.
Le Dr Jean-Michel Morel a bien voulu répondre à nos questions :
Alain Giraud : vous êtes médecin phytothérapeute… Vous enseignez d’ailleurs à la fac de Besançon dans le cadre du DU… On sent en vous une véritable passion ! Comment expliquer cet engouement ?
Jean-Michel Morel : Il me vient de ma rencontre avec le docteur Jean Valnet en 1974, lors des premières journées de phytothérapie qu’il avait organisées avec ses élèves. Ce fut pour moi, encore étudiant, une véritable révélation. Depuis, nous sommes devenus très proches et j’ai suivi tout son parcours, jusqu’à son décès en 1995. Il faut poursuivre son travail.
AG : Vous avez aussi un penchant très net pour l’aromathérapie… On utilise là l’un des principes actifs d’une plante sous forme très concentrée alors qu’en phytothérapie c’est généralement l’ensemble de la plante (son totum) qui est mis à contribution… On obtient de très bons résultats avec les huiles essentielles. Ces dernières demandent-elles plus de précautions quant à leur utilisation ?
JM M : L’aromathérapie est en effet une thérapeutique ultra puissante, utilisant une partie très concentrée de la plante, d’indications plus restreintes que celles de la plante entière, et qui peut manifester une toxicité certaine entre des mains non initiées. La branche médicale de l’aromathérapie est encore trop peu enseignée.
AG : Vous venez donc de sortir votre livre sur la phytothérapie qui vous tenait à cœur depuis pas mal de temps… Une bible très complète, très pointue ! Est-ce un livre de « plus » sur un marché déjà bien fourni ? Quelles particularités selon vous en font un livre exceptionnel ?
JM M : C’est essentiellement un ouvrage de praticien qui manipule quotidiennement les plantes médicinales, et qui a acquis une expérience qu’il souhaite faire partager. Je trouve infiniment dommage que mes confrères soient privés de cet enseignement de Matière Médicale qui faisait autrefois partie, très logiquement, des études médicales. A notre époque et à l’heure du développement durable, de la révolution écologique, des graves problèmes constatés de surconsommation médicamenteuse et d’effets indésirables des médicaments, c’est pourtant une nécessité impérieuse. Quant au contenu, il se démarque dans sa forme des ouvrages écrits par des pharmacognostes ou par des botanistes, car je l’ai voulu très pratique et de classement thématique : les plantes sont regroupées dans chaque spécialité. A dire vrai et sans fausse modestie, j’ai voulu réaliser le livre de phyto-aromathérapie que j’aurais aimé trouver lors de mon installation.
AG : A quel public s’adresse t-il ?
JM M : En premier lieu, à mes confrères médecins, qui trouveront des réponses aux nombreuses questions posées par l’usage des plantes médicinales et de leurs formes galéniques, ainsi qu’aux pharmaciens. Mais c’est aussi un ouvrage pour le public, avec des infos objectives et non polluées par des impératifs mercantiles. Je n’ai rien à vendre !
AG : Vous donnez d’ailleurs, au fil des pages, pas mal de formules à utiliser. Les avez-vous mises en pratique auprès de vos patients ?
JM M : Bien sûr ! Ce sont les préparations magistrales que je prescris quotidiennement, en tout cas des formules de base qui peuvent être adaptées à chaque patient, parce que je me suis attaché à indiquer les bases d’une bonne formulation.
AG : Quels conseils pourriez vous donner à ceux qui vont utiliser votre ouvrage ?
JM M : Ce n’est certes pas un roman ! Il faut lire l’introduction et la première partie, pour comprendre les enjeux auxquels le médicament est actuellement confronté, et l’intérêt majeur des plantes médicinales avec tous les préalables pour une bonne utilisation. Ensuite, on peut retrouver les thèmes recherchés soit en partant d’un plan très détaillé en début d’ouvrage, soit à partir de l’index des plantes situé à la fin.
AG : Avez-vous d’autres projets en préparation ?
JM M : Effectivement, un « formulaire pratique » encore plus étoffé serait le bienvenu. J’y pense en me rasant tous les matins…
AG : A qui s’adresse cette formation ?
JM M : Le diplôme Universitaire de Phyto-aromathérapie de la Faculté de Médecine et Pharmacie de Besançon se déroule comme chaque année, en deux semaines complètes,. Il est réservé aux professionnels de la santé, médecins, pharmaciens, vétérinaires, dentistes, préparateurs en pharmacie, et sur dossier à d’autres professions touchant aux plantes médicinales. C’est une opportunité pour toutes nos professions d’aborder et de démystifier à la fois scientifiquement et de manière pratique le monde des plantes médicaments.
Merci Jean-Michel Morel pour toutes ces précisions… Nul doute que votre ouvrage « Traité Pratique de la phytothérapie » aux éditions Grancher permettra à tous ceux qui s’intéressent, de près ou de loin à la phytothérapie, de l’aborder sous un éclairage nouveau pour mieux en saisir toute sa richesse.
© Alain GIRAUD
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Mots clés : remèdes, d’hier, médecine, demain