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Katy LEROUX
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Katy LEROUX
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ARTICLES / À MÉDITER

LA MÉDITATION DE LA MONTAGNE D'APRÈS JON KABAT-ZINN

article de Katy LEROUX du 04/01/15 6 minutes 10730 88



Au cours de la pratique de la méditation, nous avons beaucoup à apprendre de la montagne. En effet, dans la plupart des cultures du monde, elle représente l'archétype du sacré . Les sages ont toujours recherché dans la solitude de la montagne un renouveau et une quête spirituelle . La montagne est le symbole de l' axe premier de la terre (le mont Meru), de la demeure des dieux (le mont Olympe), du lieu où Moïse rencontra Dieu et reçut ses commandements (le mont Sinaï).

Les montagnes incarnent à la fois crainte et harmonie, dureté et majesté. Par leur simple présence, elles dominent tous les paysages de notre planète. Leur nature première est le roc . Dur comme le roc. Solide comme le roc.

Du haut de la montagne, on a une vision panoramique à l'échelle de la terre, d'où l'on aperçoit l' enracinement fragile mais tenace de la vie . Les montagnes ont joué un rôle majeur tout au long de l'histoire et de la préhistoire. Pour les peuples traditionnels, les montagnes représentaient, et représentent encore, la mère , le père , le gardien , le protecteur et l' allié.

« Emprunter » ces qualités de l'archétype de la montagne peut nous aider dans la pratique de la méditation. Ainsi, nous pouvons nous en servir. Pour affermir le moment présent dans une pureté et une simplicité élémentaires. L'image de la montagne peut rafraîchir notre mémoire sur nos motivations à maintenir la posture assise et sur la signification de demeurer dans l'état du non-agir. La nature essentielle de la montagne est l’emblème d'une présence constante et immobile.

Pourvu que cela corresponde à notre perception du sens de la montagne, on peut pratiquer la méditation de la montagne avec différentes postures. Mais d'après mon expérience personnelle, je trouve que la position assise, par terre, en tailleur, est la plus efficace dans la mesure où je ressens mon corps comme une montagne, à l'extérieur comme à intérieur. Il n'est donc pas indispensable de méditer sur ou devant une montagne. C'est son image intérieure qui nous procure sa force.

Imaginez la plus belle montagne du monde dont la forme vous plaît particulièrement. Concentrez-vous sur l'image de cette montagne dans votre œil intérieur en observant sa structure, sa cime altière, ses fondations qui émergent de la roche, ses versants abrupts et ses flancs en pente douce.

Remarquez l' immobilité de sa masse, sa beauté unique émanant de sa spécificité et incarnant en même temps les qualités universelles de sa forme.

Votre montagne aura peut-être de la neige sur son sommet et des arbres à sa base. Elle sera formée d'une seule cime proéminente, ou bien d'une série de cimes ou d'un haut plateau.

Quelle que soit la forme qu'elle revête, tranquillement assis, respirez avec cette image de la montagne en vous, en observant ses attributs.

Quand vous vous sentirez prêt, essayez de faire entrer la montagne dans votre corps, de manière que votre propre corps assis là et votre vision de la montagne ne fassent plus qu'un Votre tête en devient la cime, vos épaules et vos bras les versants tandis que vos fesses et vos jambes repliées forment la base, solidement ancrée sur votre coussin ou votre chaise.

Expérimentez à la base de votre colonne vertébrale la droiture et la sensation d'élévation de la montagne. Laissez un souffle régulier vous envahir, signifiant dans votre immobilité ce que vous êtes -au-delà des mots et des pensées- une présence centrée, enracinée et tranquille.

Vous avez tous remarqué comment la montagne est toujours là pendant que le soleil se déplace dans le ciel. Mais sur le fond immuable de la montagne, l'ombre et la lumière colorent ses flancs. Ces couleurs changeantes sont admirablement évoquées dans les chefs-d’œuvre de Claude Monet qui avait le génie de reproduire sur ses toiles le jeu subtil de la lumière qui transforme heure par heure la vie d'une cathédrale, d'une rivière ou d'une montagne. Au fur et à mesure que la lumière change, que la nuit succède au jour et le jour à la nuit, la montagne est toujours là, immuable malgré la succession des saisons et les assauts du climat. La permanence s'opposant au changement des apparences.

La neige ne subsiste pas l'été sur la crête des montagnes sauf sur quelques cimes ou crevasses abritées du soleil. À l'automne, la montagne déploie sur ses versants arborés les couleurs chaudes et brillantes des feuilles ; en hiver, un manteau de neige et de glace la recouvre. Parfois, des nuages bas ou un brouillard épais la voilent aux yeux des touristes déçus. La montagne impassible demeure inamovible malgré les tempêtes de neige et le tourbillon des vents furieux. Au printemps, les oiseaux se remettent à chanter, les bourgeons éclosent, les fleurs s'épanouissent dans les prairies verdoyantes. Mais la montagne, indifférente à ces changements des apparences, demeure.

En gardant cette image à l'esprit, nous pouvons incarner la même immobilité, le même enracinement face à tous les événements qui peuvent survenir au cours des minutes, des heures, des années de notre vie. Pendant notre pratique et notre existence quotidienne, nous éprouvons constamment la nature changeante de l'esprit et du corps ainsi que celle du monde extérieur. Nous traversons des périodes lumineuses ou des périodes sombres, des moments hauts en couleur comme des moments de lassitude morne. Ballottés par des vents violents, secoués par des tempêtes intérieures, nous endurons des périodes douloureuses tout comme nous savourons des moments de joie intense. Notre aspect physique, lui aussi, se modifie au gré des circonstances et de l'usure du temps, comme la montagne change au gré des saisons et des conditions climatiques.

En devenant « montagne » pendant la méditation, nous adoptons sa force et sa stabilité. Elle peut nous aider à voir que nos pensées et nos sensations, nos crises émotionnelles, bref les événements qui nous perturbent ressemblent aux assauts du mauvais temps. Nous avons tendance à en faire une affaire personnelle quand en réalité cela relève d'une causalité impersonnelle. Les tempêtes qui déferlent sur nos vies ne doivent pas être ignorées mais, au contraire, identifiées, ressenties, reconnues pour ce qu'elles sont car elles ont le pouvoir de nous détruire. Avec cette attitude intérieure, nous arriverons à éprouver face à la tempête un calme, un silence et une sagesse dont nous ne nous serions jamais crus capables. Voilà ce que les montagnes ont à nous apprendre si nous savons écouter.

Cependant, la méditation de la montagne n'est, en fin de compte, qu'un support destiné à nous venir en aide. Après l'avoir contemplée, c'est à nous de faire le premier pas et de poursuivre notre chemin. Les êtres humains sont bien plus complexes et plus intéressants que les montagnes !

Nous sommes des montagnes en mouvement qui respirent et qui dansent. Nous avons à la fois la capacité d'être aussi fermes que le roc et d'avoir la fluidité de l'eau. Nous disposons d'un potentiel immense. Nous pouvons voir et sentir. Nous pouvons comprendre et savoir. Nous pouvons apprendre, grandir et surtout nous pouvons guérir si nous apprenons à entendre l'harmonie intérieure des choses et à garder l'axe central de la montagne malgré les intempéries et les circonstances extérieures.

**********

Les oiseaux ont disparu dans le ciel,
Le dernier nuage s'est évanoui.
Nous sommes assis ensemble,
La montagne et moi,
Jusqu'à ce que, seule, la montagne demeure. Li Po

EXERCICE


Gardez à l'esprit l'image de la montagne pendant que vous pratiquez la méditation assise. Explorez la capacité de vous aider à demeurer dans le calme, à rester assis pendant des périodes de plus en plus longues, face aux difficultés quotidiennes, au tumulte ou à la morosité de vos pensées.
Demandez-vous ce que cette pratique vous apporte. Vous apercevez-vous de transformations subtiles dans votre attitude vis-à-vis des changements imprévus qui surviennent dans votre vie? Pouvez-vous vivre chaque jour avec cette vision intérieure de la montagne ? Voyez-vous la montagne chez les autres ? Acceptez-vous les formes qui leur sont propres, chaque montagne étant unique ?


Source "Où tu vas, tu es" de Jon Kabat-Zinn Editions Aventure Secrète, p 146-151
© Katy LEROUX
reproduction intégrale interdite, tout extrait doit citer mon site www.theraneo.com/katy-leroux

Mots clés : méditation, montagne, après, jon, kabat-zinn

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