Nous rencontrons énormément de parents autour de nous qui donnent à leurs enfants des surnoms tels que « ma petite puce », « mon microbe », « mon p’tit monstre », "mon petit lait"…
Si ces parents voient dans ces surnoms un côté affectif, qu’en est-il des enfants ?
Que se passe-t-il dans leur cerveau ?
Ces surnoms ne contribuent-ils pas, involontairement, à leur apposer une étiquette ?
Dans son livre "J’ai tout essayé" Isabelle Filliozat définit les étiquettes comme des termes qui « déclenchent une réaction de stress dans l’organisme », « inhibant les capacités de l’enfant », étiquettes auxquelles l’enfant « se conformera ». La ligne floue entre surnoms affectueux et surnoms négatifs
Les parents ne pensent évidemment pas au parasite en appelant leurs enfants « ma puce », ou à la bête du Gévaudan en les nommant « mon p’tit monstre ». Il s’agit la plupart du temps de surnoms affectueux, attribués sans connotation négative et généralement utilisés lors de démonstrations d’affection : «Comment s’est passée ta journée ma puce ? Tu m’as manqué tu sais! » ; « je t’aime ma princesse » ; «comme tu es beau mon poussin ! ».
Y a-t-il vraiment un côté néfaste à donner des surnoms à nos enfants ? Si nous avons vu au-dessus que beaucoup de surnoms sont donnés lors de moments d’amour, donc lors de situations positives, où tout se passe bien, qu’en est-il lorsque le parent se remet à appeler son enfant par son prénom ? Ce dernier peut-il imaginer que dans ce cas, il ne s’agisse pas d’un échange affectueux, et donc que la situation est plus sérieuse ? Peut-il imaginer qu’il a fait quelque chose d’inapproprié ?
J’ai remarqué que souvent, les parents donnent des surnoms tout mignons à leurs enfants quand les conditions sont favorables : tout le monde s’entend bien, on rit, on discute (« je t’aime ma puce ») et d’un coup, paf, le verre d’eau tombe et se brise (oh M. ! Mais c’est pas vrai, ça ! Tu peux pas faire attention ? ») et les parents se mettent soudainement à appeler leurs enfants par leur véritable prénom.
Il me semble donc indispensable que chaque parent, même s’il trouve les surnoms qu’il donne à son enfant adorables et affectueux, se demande ce que ressent son enfant lorsqu’on le surnomme de telle ou telle manière. Lorsque j’appelais mon fils « ma puce », il ne disait rien, au début, tout simplement parce qu’il n’en avait pas les capacités langagières. Quand il a commencé à bien s’exprimer, à faire part de ses ressentis, il m’a dit « Arrête de m’appeler comme ça, maman, je ne m’appelle pas ta puce, je m’appelle L. » Cette phrase m’a permis de me questionner à ce sujet, et de me dire qu’au-delà du terme « puce » qui pouvait le gêner, il y avait également le déterminant possessif « ma ». Or, mon fils ne m’appartient pas. Peut-être lui retirais-je involontairement un peu de son unicité en l’appelant de la sorte.
Ne parlons pas des surnoms dévalorisants et humiliants tels que « ma pisseuse », «mon p’tit merdeux », « le chiard »…qui sont d’une violence sans nom !
En conclusion, je pense que même si l’intention qui est donnée est importante, elle n’est pas LA PLUS importante. Ce qui est nécessaire, à mon sens, est de prendre en compte ce que ressent l’enfant lorsqu’on lui attribue, occasionnellement ou non, un surnom. N’oublions pas également que les tout-petits n’ont pas la capacité à comprendre le second degré.Evidemment, pour les parents, dire « t’es vraiment un p’tit monstre ! » après que l’enfant ait jeté la télécommande de mamie Josette sur la vitrine d’oeufs de collection Faberg, ou pendant une bataille de chatouilles, cela n’a pas du tout le même sens. Mais l’enfant ne comprenant pas le second degré, que se passe-t-il dans son esprit ?
Il peut comprendre qu’il est un monstre. D’autant plus s’il est habitué à entendre ce mot de façon récurrente. Ce surnom peut donc devenir une étiquette qui colle à l’enfant et à sa personnalité. On l’appelle de cette façon quand on considère que son comportement est inadéquat. Cette image va donc s’ancrer en lui et son comportement collera parfaitement au surnom qu’on lui a donné.
En effet, cette étiquette risque d’amplifier ses comportements. Le cercle vicieux en somme… l’effet Pygmalion, défini comme la capacité des attentes sociales à créer des réalités sociales, la « prophétie auto-réalisatrice ».
Ainsi, chacun doit rester vigilant afin de ne pas enfermer l’enfant dans un comportement qui colle avec le surnom qui lui est donné, comme faisant partie intégrante de sa personnalité. Même avec des surnoms qui peuvent paraître tout mignons au premier abord, il est possible que l’on colle inconsciemment des étiquettes à nos enfants.
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Mots clés : surnoms,enfants,parentalité,éducation
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