Tu es trop gentil, elle n'est pas à la hauteur, je pourrais faire mieux, il n'est pas assez...
Elle est plus, moins bien, mieux, etc.
Qui n'a jamais utilisé ou entendu ces petits mots "trop", "pas assez", "mieux", etc ?
Peut-être vous, mais pas moi !
Par mon expérience pratique en communication positive et non violente, j'ai vite conscientisé les freins à l'échange induits par ces jeux comparatifs non achevés.
C'est aussi le constat fait par les personnes que j'accompagne à oser dire non.
Derrière ces petites phrases a priori anodines se cachent souvent des demandes personnelles et/ou des besoins que la personne ne sait pas toujours repérés, formulés.
1) Si vous dites et/ou écrivez ce type de phrases, demandez-vous :Trop gentil par rapport à qui, à quoi, à quelle grille de référence, si ce n'est notre propre filtre et notre propre histoire personnelle ?
Qu'est-ce que cela signifie ?
Une invitation à creuser le sujet en se demandant : "trop gentil " par rapport à qui, à quoi, à quelle norme ?
Le "tu es trop gentil" peut simplement signifier pour la personne qui le prononce :
- j'ai besoin de participer à ton évolution et/ou épanouissement personnel ;
- ou j'ai besoin de savoir comment tu te sens dans ton affirmation personnelle ;
- ou j'ai besoin de savoir où tu en es dans ta capacité à dire non à te positionner.
- ou je me sens inquiète pour toi à ce sujet. Comment te sens-tu ?
- ou fais-moi plaisir ;
- ou fais des efforts ;
- ou sois parfait ;
- ou dépêche-toi ;
- ou sois fort.
Ces cinq derniers sont aussi nommés des « drivers »en analyse transactionnelle. Des sortes de petits messages entendus pendant notre tendre enfance, parfois non sans autorité, et qui ont pu conditionner certains de nos comportements et/ou attitudes d'adultes de façon souvent inconsciente. Ils sont parfois assimilés dans nos programmes de construction psychique comme des comportements à adopter vis-à-vis de soi, des autres et/ou du monde. Ils ont contribué à façonner notre personnalité.
De la même façon et dans un autre registre, pour élargir un peu, "mon agenda est trop rempli", "j'ai trop de choses à faire", peut vouloir dire : j'ai besoin de repos, de vide, d'espace..Je me sens fatigué(e) et/ou surmené(e). J'ai besoin de soutien, j'ai du mal à m'organiser, etc.
2) Si on vous écrit et/ou dit cela, comment cela résonne-t-il pour vous ?-comme le fait de ne pas être assez ceci ou cela, d'être incomplet ?
-ou comme un reproche, une injonction au changement, à la vigilance ?
-ou un coup à votre confiance en vous et/ou estime de vous ?
-ou comme étant pointé(e) dans une de vos faiblesses ?
-ne répondant pas aux attentes de l'autre, de la famille, de la société, du monde ?
-comme recevant une couche de colle supplémentaire au post-it de l'étiquette du trop ci ou pas assez cela ?
-ou si vous avez déjà un peu cheminé sur le sujet, dans la compréhension et la conscience qu'à travers ces mots la personne parle d'abord d'elle-même, de ses propres besoins, peurs, qu'elle n'a peut-être pas appris à formuler autrement.
Dans l'échange, avez-vous observé que cela peut faire se refermer la personne et/ou bloquer la conversation ?
-Cela se vérifie surtout si elle souffre déjà de difficulté d'affirmation et/ou d'amour de soi, et/ou de confiance en soi et/ou d'estime de soi.
La réponse favorisant l'échange pourrait être :
« Trouves-tu qu'il y a des trop gentils, des pas assez gentils et des juste gentils? »
« Ah bon, tu me trouves trop gentil, qu'est-ce qui te fais dire ou écrire cela ? »
Bien sûr, cela ne sera possible que si la personne est suffisamment distanciée quant à sa propre réactivité émotionnelle sur le sujet.
À ce moment-là nous donnons à l'émetteur la possibilité de clarifier sa pensée, son ressenti, son besoin. C'est aussi donner au récepteur la possibilité de clarifier sa position sur son affirmation de soi, et/ou sa confiance, et/ou sa capacité à dire "non".
Dans mon expérience, la gentillesse n'est jamais le problème, c'est même une vertu. Pourquoi imposer une limite à la gentillesse ?
Le "tu es trop gentil" est la partie immergée de l'iceberg qui parle souvent de tout autre chose, autant pour celui qui prononce ces mots que celui qui les reçoit.
Si vous vous auto-observez, vous vous rendrez possiblement compte que cet éclairage sur les "trop", "pas assez", "mieux", "plus" et autres comparatifs s'applique à bien des sujets.
Je ne vous partage pas là une vérité, mais plutôt le fruit d'une expérience pratico-pratique en matière de communication positive et de positionnement dans les relations humaines.
© Pascale SÉGURA
reproduction intégrale interdite, tout extrait doit citer mon site www.theraneo.com/pascale-segura
Mots clés : gentillesse, trop, communication, positive, pascale, ségura
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