Se comprendre n’est pas se Rencontrer, se connaître n’est pas se Vivre (en Conscience).
Dans notre culture « mieux se connaître soi-même» est celle d’une démarche qui consisterait à développer une compréhension uniquement intellectuelle de ses fonctionnements propres. Cela aboutit à des sentences toujours à peu près équivalentes, telles que : « J’ai beaucoup réfléchi sur moi-même et j’ai compris pourquoi je fais ceci ou cela… », « Je me suis introspecté et j’ai compris d’où venaient mes problèmes ». Ou bien encore : « Moi, j’ai fait mon auto-thérapie », « J’ai lu un bouquin et j’ai fait tous les exercices … Du coup, je me suis "auto-thérapisé"… »
Cette vision repose d’une part sur une tendance humainement normale ( ou normalement humaine ?) de la psyché humaine à mettre en œuvre des mécanismes de défense (ici d’intellectualisation) face aux affects inconscients ou réprimés qui cherchent à s’exprimer en nous, à travers notre Corps et également face à la nécessité de se confronter à la nécessité de « se dire » à un tiers dans le processus thérapeutique.
Mais elle est également, à mon sens, renforcée (et peut-être même générée dès le plus jeune âge) par la Culture du « tout cartésien », dont l’une des croyances fondamentales – qui est désormais infirmée par les neurosciences elles-mêmes (cf. « L’erreur de Descartes » de A. Damasio) mais pourtant toujours ignorée dans les formations académiques – consiste à penser qu’il suffirait, pour mener à bien son processus de transformation personnelle, d’acquérir une compréhension logique et analytique de soi-même et de l’autre, à l’aide d’un simple travail de réflexion et/ou d’accumulation de connaissances théoriques sur la psychologie humaine, et/ou d’observation des comportements et problématiques … de l’Autre.
– C’est là le mythe, si répandu dans notre Culture, d’une objectivité qui pourrait illusoirement être obtenue en se mettant en position d’observateur rejetant toute expérience subjective. Ce positionnement permet alors de garder à distance ses propres vécus internes à travers l’alibi de l’étude de l’Autre, et également par voie de conséquence, de faire l’économie du miroir absolument nécessaire que constitue l’autre dans notre évolution.
(Notons cependant que les choses évoluent et que les neurosciences elle-mêmes commencent à réintégrer la Subjectivité comme ayant droit de cité dans le processus de la connaissance scientifique ).Mais, s’il est bien une leçon fondamentale que toute expérience psychothérapeutique véritable finit par enseigner au patient, c’est que se contenter de se comprendre cognitivement en faisant l’économie de se vivre émotionnellement ne produit tout au plus qu’un effet thérapeutique léger et superficiel (quand il n ‘ y a pas simplement « déplacement du symptôme », c’est-à-dire transformation de ce dernier en un autre symptôme, du fait que le problème a été « traité » sans que sa source n’en ait été conscientisée ).
Aux antipodes de cette vision sociétale « cartésiano-religieuse » d’un intellect supposé objectif, noble, vertueux, tout-puissant et sensé dominer un corps et des émotions qui ne feraient qu’obscurcir le jugement (on a montré la fausseté de cette vision depuis 1990, avec les travaux de Damasio notamment qui ont mis en évidence qu’une prise de décision ne peut être pertinente et rationnelle qui si elle allie raison et émotion),
l’expérience montre bien que tout cheminement vers une transformation profonde de soi passe, obligatoirement, par une phase temporaire de « retraversée émotionnelle» et de « conscientisation/élaboration » des affects inconscients ou réprimés, qui furent inscrits à notre insu dans notre corps et notre « cerveau émotionnel », à l’occasion des petits et/ou grands traumas de notre Existence.
En d’autres termes, ces émotions enfouies en nous demandent, en premier lieu, à être recontactées et revécues à travers des expériences corporelles et émotionnelles (parfois cathartiques) pour, ensuite seulement, être intégrées grâce à une mise en conscience de l’expérience, elle-même rendue possible à travers le processus de verbalisation adressé à un tiers. Ce n’est donc que par une « confrontation expérientielle et conscientisante » à ces aspects cachés de nous-mêmes, à cette part d’ombre telle que Jung la nommait, que le processus de constituance de l’Être peut progresser et s’affermir.
Et c’est sans doute le plus difficile (mais aussi le plus fondamental) des aspects à accepter et à intégrer pour le patient « débutant » en psychothérapie : comprendre que, tout comme une expérience somato-émotionnelle cathartique non accompagnée d’une mise en mots ultérieure est rarement résolutoire, de même, le recours exclusif à la parole, à la pensée ou à la visualisation, avec exclusion de toute travail de Conscience corporelle et émotionnelle ne fait qu’alimenter un mécanisme de fuite de soi-même dans l’intellectualisation/imagination…
En d’autres termes, le travail thérapeutique consiste à explorer, conscientiser et harmoniser l’ensemble des dimensions interconnectées qui nous constituent, nous, êtres humains :
Somato (Conscience corporelle et émotionnelle),
Psycho (Pensées, images,…)
Socio (Vie relationnelle).
Rédigé par Cyril Cabane Psycho- Somatothérapeute, Psycho-Somatanalyste Pléni-intégratif ® - Enseignant Méditation - Coach
© Marianne NYS
reproduction intégrale interdite, tout extrait doit citer mon site www.theraneo.com/nys
Mots clés : corps,thérapeute
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