L’imagerie mentale, une technique pour apprendre, s’entraîner et performerDe nombreux sportifs utilisent l’imagerie mentale de façon plus ou moins consciente et plus ou moins maîtrisée. C’est une des techniques les plus connues et les plus répandues en préparation mentale. Mais peut-elle être efficace pour tous les pratiquants quel que soit leur niveau de pratique ? Comment peut-elle être utilisée à l’entraînement et en compétition ?
Imagerie mentale ou visualisation ?
L’imagerie mentale consiste à créer ou à recréer une expérience, une situation, un geste dans sa tête. Tous les sens peuvent être mobilisés. Ainsi une image peut être visuelle (par exemple, je me vois faire mon geste), kinesthésique (je m’imagine les sensations liées à l’impulsion, à l’élévation, à la réception…), auditive (je m’imagine le bruit de la frappe de balle), olfactive et gustative (ces 2 dernières ne nous semblant pas avoir vraiment de pertinence en sport). Ces différentes modalités sensorielles peuvent être toutes associées ou utilisées de manière isolée. La visualisation est une forme spécifique d’imagerie mentale qui consiste à créer des images visuelles.
Comment ça marche ?
L’imagerie mentale est une technique dont l’efficacité a été maintes fois vérifiée et confirmée par les recherches en psychologie du sport. Ainsi, plusieurs études démontrent que le fait d’imaginer un geste permet d’en améliorer la réalisation. On voit ici l’intérêt pour le sportif blessé. De même, l’utilisation de l’imagerie combinée à l’entraînement permet d’optimiser l’apprentissage et la performance. Si son efficacité a été démontrée dans tous les sports, elle est d’autant plus pertinente dans les activités présentant peu d’incertitude (le lancer-franc en basket, le plongeon, la gymnastique ou le patinage artistique). Dans ces sports, beaucoup de champions assurent que le travail avec l’imagerie leur a permis de gagner.
Par ailleurs, de nombreuses recherches font apparaître son efficacité à tous les niveaux de pratique. Bien qu’elle ne remplisse pas les mêmes fonctions, elle peut tout autant favoriser l’apprentissage chez le débutant et aider le sportif à réaliser les plus hautes performances.
Plus récemment, les neurosciences ont permis d’expliquer sur quoi reposait ce pouvoir de l’imagerie. En effet, une découverte majeure dans l’histoire des neurosciences fut celle des neurones miroirs et de leur fonctionnement. Ces neurones s’activent de manière quasi-identique lorsque qu’on réalise un geste, lorsqu’on l’imagine ou lorsqu’on l’observe. L’existence des neurones miroirs vient alors justifier les possibilités d’apprentissage par l’imagerie mentale.
L’imagerie mentale, c’est aussi une habileté mentale, c’est-à-dire une capacité qui se développe et s’entraîne. Les sportifs sont plus ou moins capables de créer des images mentales claires et précises. En s’entraînant à créer des images, on développe cette capacité. D’où l’intérêt d’inciter dès le plus jeune âge, les sportifs à faire de l’imagerie.
Pourquoi, et comment?
L’imagerie est un outil qui offre de nombreuses possibilités, à condition de savoir précisément ce que l’on veut en faire. La clé de l’utilisation de l’imagerie est simple mais il faut apprendre à l’utiliser efficacement. Ce qui est imaginé, dépend de ce que le sportif cherche à faire.
Pour faire simple, trois points doivent être précisés quand on utilise l’imagerie.
Définir le but de la séance pour préciser le contenu
Le sportif doit identifier ce qu’il a besoin de travailler (un point technique, de la tactique, la gestion des émotions), donc commencez par définir avec lui le but de la séance ou de l’exercice. La réponse à la question « POURQUOI ? » est la raison pour laquelle il fait de l’imagerie. Ensuite, il pourra choisir le « film » qu’il va imaginer en fonction de ses besoins. En quelque sorte, le sportif est à la fois le producteur, l’acteur et le spectateur de son film.
Que doit voir le sportif ?
Aidez le à choisir le contenu du « film » qu’il va fabriquer ou qu’il va se passer dans la tête. C’est la réponse à la question « Quoi »? Il est aussi caméraman et réalisateur.
Le film est-il vu par ses yeux, de l’intérieur (on parle d’une perspective interne) ou bien comme filmé du bord du terrain (c’est une perspective externe) ? S’agit-il d’un gros plan sur la saisie de la raquette, du bruit des pieds sur la course d’élan ou bien de sensations de flexion dans les jambes lors d’une projection ?
Au début, si le sportif n’arrive pas à faire des films complexes qui prennent tout en compte, conseillez d’imaginer seulement des films courts et simples, des éléments essentiels de son action.
Les réglages ...
Enfin la qualité des images doit être précisée. C’est la réponse à la question « Comment ? »
Il peut faire varier la vitesse de son film, faire des arrêts sur image, modifier les couleurs, jouer sur la netteté. Il a la télécommande, avec la pause, le ralenti, ou les réglages de contraste et de luminosité.
À retenir
Une bonne qualité d’image et le meilleur des scénarii ne servent à rien s’ils ne sont pas adaptés aux besoins du sportif dans une situation donnée. Prenez soin d’ajuster avec lui le contenu des images à la spécificité de ses besoins.
Quelques exemples :
pour la gestion des émotions devant un public, le sportif peut s’imaginer, quelques jours avant, en situation de compétition. Il pourra alors ressentir tous les détails liés à la présence du public (le bruit, les regards, la présence de son entourage) ainsi que les émotions probablement associées. Puis il s’entraîne, toujours par imagerie, à bien se concentrer sur ce qu’il aura à faire, par exemple porter son attention sur des points techniques, bien prendre les informations pertinentes sur le jeu…
pour travailler une nouvelle technique, les images peuvent être lentes, filmées de l’extérieur (perspective externe). Puis progressivement, la vitesse des images peut être accélérée. Ainsi le film finit par se dérouler à la même vitesse que l’action réelle. Les images visuelles peuvent être combinées avec une perspective interne et des images kinesthésiques des bonnes sensations.
pour travailler les aspects tactiques, les sportifs peuvent utiliser des vidéos de matchs afin de se construire des scénarii qui les aideront à préparer leurs schémas de jeu. Ils peuvent aussi regarder une situation de match puis imaginer leurs actes, leurs décisions, l’action qu’ils conduiraient dans cette situation.
A quels moments utiliser l’imagerie mentale ?
L’imagerie mentale peut être intégrée à chaque entrainement. Il peut s’agir de combiner des répétitions par imagerie et des répétitions réelles dans un même exercice technique. Cela permet de doubler la quantité de pratique en réduisant la fatigue.
De plus, lorsqu’un entraineur demande à un sportif de s’imaginer son action avant de la réaliser, il favorise sa préparation, sa compréhension et sa concentration. Il optimise ainsi son apprentissage. En se voyant faire l’action correctement, le sportif sera plus motivé et plus confiant.
Faire des exercices d’imagerie entre les entraînements. Dans ce cas, les exercices peuvent durer de 8 à 12 minutes. Il n’est pas nécessaire que la séance soit plus longue, ni qu’elle soit précédée de relaxation. En revanche, faire deux à trois séances par semaine, dans le bus, au réveil ou après une compétition.
Enfin, les images mentales peuvent aider le sportif pendant une compétition. Dans ce contexte, il ne faut pas abuser d’images mentales trop compliquées qui risquent de provoquer un épuisement mental. Chaque sportif peut avoir des images simples qui lui seront particulièrement utiles en fonction de ses besoins en compétition (par exemple, pour se rappeler le parcours, pour se calmer, pour s’activer…).
Références
Fournier, J. , Deremaux, S., & Bernier, M. (2008). Content, function and characteristics of mental imagery. Psychology of Sport and Exercise, 9, 734-748.
Bernier, M., & Fournier, J. F. (2010). Functions of mental imagery in expert golfers. Psychology of Sport and Exercise, 444-452.
© Anne-Catherine ZUSSINI
reproduction intégrale interdite, tout extrait doit citer mon site www.theraneo.com/zussini
Mots clés : performance,imagementale
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